Autodiagnostic et santé mentale : TikTok, un danger grandissant pour les jeunes

TikTok est devenu en quelques années l’un des réseaux sociaux les plus influents chez les jeunes. Grâce à son format court, rythmé et facilement partageable, il capte l’attention et façonne les opinions de millions d’adolescents à travers le monde. Sur cette plateforme, on trouve de tout : humour, danse, conseils de vie, récits intimes, et de plus en plus fréquemment, des contenus sur la santé mentale.

Des vidéos traitant de troubles tels que l’anxiété, la dépression, le trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH), les troubles du comportement alimentaire, les troubles obsessionnels compulsifs ou encore le trouble borderline, sont massivement partagées. Cette mise en lumière de la santé mentale pourrait sembler positive à première vue, mais elle donne lieu à une dérive de plus en plus alarmante : l’autodiagnostic mental chez les jeunes.

L’autodiagnostic mental : une tendance amplifiée par les réseaux

L’autodiagnostic consiste à attribuer soi-même un trouble psychologique sur la base de symptômes ressentis ou observés, sans passer par un professionnel de santé. Cette pratique existe depuis longtemps, mais elle s’est multipliée avec l’essor des réseaux sociaux et particulièrement TikTok.

Sur TikTok, de nombreux créateurs publient des vidéos comme « 10 signes que tu souffres d’anxiété », « Voici comment savoir si tu es TDAH », ou encore « Les symptômes du trouble borderline que personne ne te dit ». Ces contenus, courts, simples et très engageants, invitent les jeunes à s’identifier à une liste de comportements souvent vagues et généralisés. Le résultat est préoccupant : beaucoup d’adolescents en viennent à croire qu’ils souffrent d’un trouble mental sans jamais consulter de professionnel.

Pourquoi TikTok facilite-t-il l’autodiagnostic ?

TikTok agit comme un catalyseur pour l’autodiagnostic chez les jeunes pour plusieurs raisons.

D’abord, la plateforme fonctionne selon un algorithme puissant qui propose du contenu basé sur les centres d’intérêt de l’utilisateur. Ainsi, si un adolescent interagit avec une vidéo sur la dépression, il se verra rapidement proposer davantage de contenus similaires, créant un effet d’amplification.

Ensuite, l’adolescence est une période marquée par la recherche d’identité, l’instabilité émotionnelle et la quête de sens. Il est donc naturel que les jeunes se reconnaissent dans les descriptions générales de certains symptômes. Le besoin d’appartenir à une communauté, d’être compris et de mettre des mots sur son mal-être peut les pousser à se rattacher à un diagnostic non confirmé.

Enfin, la parole autour de la santé mentale s’est libérée sur les réseaux, ce qui est en soi une avancée. Mais cette démocratisation rapide s’est faite sans encadrement, laissant place à des informations erronées, mal interprétées ou trop simplifiées.

Les risques liés à l’autodiagnostic sur TikTok

L’autodiagnostic peut avoir des conséquences sérieuses pour la santé mentale et le bien-être des jeunes.

Tout d’abord, il peut conduire à des erreurs de jugement. Beaucoup de symptômes liés à des troubles psychologiques sont en réalité partagés par une grande partie de la population à certains moments de la vie : difficultés de concentration, fatigue, tristesse, irritabilité, manque de motivation. Interpréter ces ressentis comme des signes d’un trouble peut aggraver l’anxiété ou générer un sentiment d’impuissance.

Ensuite, l’autodiagnostic peut retarder ou empêcher la consultation d’un professionnel. Certains jeunes, convaincus qu’ils connaissent déjà leur trouble, estiment ne pas avoir besoin d’aide ou rejettent les avis médicaux qui ne vont pas dans le sens de leur auto-évaluation.

Il existe aussi un risque d’auto-enfermement dans une étiquette. Se croire atteint d’un trouble psychologique sans diagnostic réel peut conditionner les comportements, réduire la confiance en soi, ou devenir une justification permanente pour certaines attitudes, même en l’absence de pathologie.

Enfin, cette tendance contribue à banaliser et déformer des troubles mentaux graves, en les réduisant à quelques symptômes visibles ou à des vidéos esthétiques. Cela porte atteinte à la compréhension publique de ces troubles et à la reconnaissance des personnes qui en souffrent réellement.

La responsabilité des créateurs et de la plateforme

Beaucoup de créateurs de contenu partagent leurs expériences avec sincérité, dans le but de sensibiliser ou de rassurer. Certains ont été diagnostiqués tardivement et souhaitent éviter aux autres la même errance. Cependant, même les meilleures intentions ne remplacent pas l’expertise médicale.

La ligne est souvent floue entre témoignage personnel, conseil de santé, et contenu viral. Certains créateurs, influents et très suivis, peuvent donner l’impression qu’ils sont légitimes à poser des diagnostics, alors qu’ils ne disposent d’aucune formation en santé mentale.

La plateforme elle-même a une part de responsabilité. TikTok ne régule pas suffisamment les contenus liés à la santé mentale et n’indique pas systématiquement des avertissements ou des liens vers des ressources fiables. L’absence de modération spécifique laisse libre cours à la diffusion de vidéos parfois inexactes, voire dangereuses.

Que peuvent faire les parents, les éducateurs et les institutions ?

Face à ce phénomène, il est essentiel que les adultes jouent un rôle actif dans l’éducation numérique et émotionnelle des jeunes.

Il faut d’abord encourager les adolescents à développer un esprit critique face aux contenus qu’ils consomment. L’éducation aux médias, l’enseignement de la pensée analytique et la compréhension des algorithmes doivent faire partie des apprentissages scolaires dès le plus jeune âge.

Il est également nécessaire d’ouvrir le dialogue autour de la santé mentale. Les jeunes doivent pouvoir parler de leurs doutes, de leurs peurs et de leurs ressentis sans jugement, que ce soit dans la famille, à l’école ou dans des structures spécialisées. Le simple fait de se sentir écouté peut réduire le besoin d’aller chercher des réponses sur les réseaux.

Les institutions doivent, quant à elles, améliorer l’accessibilité aux soins psychologiques. La présence de psychologues dans les établissements scolaires, les campagnes d’information, et la gratuité de certains dispositifs d’écoute doivent être renforcées.

Une vigilance collective nécessaire

L’explosion des autodiagnostics mentaux chez les jeunes sur TikTok révèle un double besoin : celui de comprendre ce que l’on ressent et celui de se sentir reconnu. Cette quête de sens est légitime, mais elle ne doit pas être laissée aux mains d’une plateforme fondée sur l’engagement, la viralité et l’émotion.

Il est impératif de sensibiliser les jeunes à la complexité de la santé mentale et à l’importance de la consultation médicale. TikTok peut être un point de départ pour ouvrir le dialogue, mais il ne doit jamais en devenir la seule source. Il en va de la santé, de l’équilibre et de l’avenir psychologique d’une génération entière.

Autodiagnostic

Nous vous invitons…

Nous vous invitons à prendre rendez-vous avec un de nos psychologues, psychothérapeutes et psychopraticiens afin de faire un premier pas vers le changement que vous désirez. Si vous désirez obtenir de plus amples informations ou si vous avez des questions, n’hésitez pas à nous téléphoner. Vous pouvez prendre un rendez-vous par téléphone ou en envoyant un email au cabinet des Psychologues de Paris 9 (à l’attention du psychologue ou psychothérapeute de votre choix).